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Toute la journée, vous traitez des messages, vous répondez à des demandes, des problèmes de dernière minute vous interrompent en continu. Le soir venu, vous ne sauriez pas dire précisément ce que vous avez accompli. Ce morcellement affaiblit l’attention. Un peu comme Montaigne l’écrivait dans ses Essais, « nous ne sommes jamais chez nous, nous sommes toujours au-delà » [1]. Ce temps fragmenté empêche de rester concentré sur une tâche, ou de suivre une idée jusqu’au bout.
Pour limiter cette dispersion, vous avez peut-être mis en place des stratégies éprouvées : bloquer des plages horaires, supprimer les notifications, méditer quelques minutes pour dépolluer l’attention. Ces ajustements sont nécessaires, bénéfiques et profitables. Mais ils ne suffisent pas toujours à recréer une continuité dans la pensée.
La culture générale peut justement pallier ce manque de concentration, en apportant une forme de cohérence intellectuelle. Elle organise et structure l’attention, sans l’épuiser. Dans cet article, vous verrez en quoi le fait d’enrichir votre bagage culturel peut améliorer la qualité de votre travail quotidien.
Note : cet article invité a été écrit par Eva Lee du blog Mon Bagage Culturel
1. Les bienfaits de la culture générale sur la productivité
Depuis que je prends le temps d’élargir mes connaissances dans différents domaines culturels, « j’ai constaté un effet direct sur ma productivité : je me concentre mieux et je prends des décisions plus rapidement. C’est un fait que les chercheurs en neurosciences ont établi : la culture générale crée des conditions favorables à une productivité plus efficace et plus constante. Ce lien de cause à effet repose sur deux leviers cognitifs complémentaires, que je vous détaille immédiatement, dans les lignes qui suivent.
Dans Hyperfocus [2], Chris Bailey explique qu’une tâche complexe mobilise davantage de ressources attentionnelles qu’une tâche routinière. En s’y exerçant régulièrement, on apprend à maintenir un effort de concentration dans la durée. En plus de nous rendre plus intelligent, ce type d’attention améliore l’efficacité du travail en nous permettant de prolonger l’effort sans nous éparpiller.
Mais la performance ne repose pas seulement sur la capacité à rester concentré. Elle dépend aussi de la qualité des solutions qu’on est capable de trouver. Armand Hatchuel, professeur à Mines Paris, a formalisé avec son équipe la théorie C-K (Concept–Knowledge) [3]. Elle repose sur une idée structurante, qui définit l’innovation comme un équilibre entre deux éléments :
- les concepts, qui désignent les idées nouvelles à élaborer ;
- les connaissances, qui rassemblent les savoirs déjà établis.
Plus ce socle de connaissances est articulé et disponible, plus il devient facile d’élaborer des hypothèses en repérant des connexions utiles. À l’image de Léonard de Vinci, dont la curiosité encyclopédique liait anatomie, géométrie, ingénierie, sculpture et peinture, une culture transversale nourrit des associations d’idées fécondes.
Un exemple concret : Maxime est coach en organisation pour freelances. Il prépare une vidéo sur les rythmes de travail. Plutôt que de se perdre dans des recherches interminables, il s’appuie sur un souvenir d’étude : le modèle des trois temps dans la Rome antique (temps libre, temps civique, temps productif). À partir de là, il structure sa vidéo en quelques heures et divise son temps de production par deux.
Peu importe notre quotient intellectuel, la culture générale fertilise nos idées et rend la réflexion plus incisive.
2. Comment les sciences humaines renforcent les capacités cognitives et la clarté mentale
L’histoire, la philosophie ou encore la sociologie aident les entrepreneurs à penser hors des cadres. Mais leur intérêt ne s’arrête pas là. Les sciences humaines sont aussi des outils cognitifs qui servent à charpenter l’information et à ordonner les idées.
2.1) La dispersion est causée par notre environnement
Jean-Philippe Lachaux, chercheur à l’Inserm et auteur du Cerveau funambule [4], rappelle que notre cerveau alterne en continu entre deux régimes attentionnels :
- l’exploitation (focalisation sur une tâche en cours)
- l’exploration (recherche de stimuli nouveaux).
La dispersion n’est donc ni une marque de faiblesse ni un défaut moral, elle constitue une réponse neurobiologique pour s’adapter à un environnement saturé.
Or, les sciences humaines apportent un contrepoids à cette dispersion. Elles permettent de construire des structures mentales stables, qui favorisent une meilleure coordination entre les réseaux de neurones impliqués dans l’attention et la mémoire de travail.
2.2) Les sciences humaines aident à fixer l’attention
Le sociologue Dominique Boullier [5], professeur émérite à Sciences Po Paris et spécialiste des régimes attentionnels, distingue quatre formes d’engagement mental :
- alerte, pour capter les signaux faibles ;
- immersion, pour suivre une tâche soutenue ;
- projection, pour préparer la suite ;
- fidélité, pour rester ancré malgré la complexité.
Ces régimes s’enchaînent en continu. Quand l’un chasse l’autre sans logique, l’attention s’effondre, et l’esprit saute d’une pensée à une autre ou s’interrompt brusquement : à terme, on s’épuise.
Dans ce contexte, un bagage culturel solide agit comme un stabilisateur. Il se construit généralement à travers des formats longs : livres, documentaires, enquêtes.
Ce type de contenu demande de la patience et de la persévérance, car il faut accepter de ne pas tout comprendre immédiatement. Il oblige à accueillir des points de vue différents, et forge la capacité à rester concentré, à se focaliser sur un texte, au même titre que la méditation.
3. La culture comme levier de confiance en soi dans les interactions sociales et professionnelles
Dans un conflit professionnel et dans toute relation sociale tendue, en plus de savoir garder son calme, il faut faire preuve de précision. En effet, un raisonnement flou ne résiste jamais très longtemps à la contradiction. En revanche, mobiliser les mots justes grâce à notre richesse lexicale renforce nos compétences émotionnelles, en donnant du poids aux arguments.
À diplôme équivalent, plusieurs enquêtes (notamment celles relayées par L’Institut de l’entreprise [6]) montrent que les collaborateurs les plus cultivés progressent plus vite dans les organisations. Pourquoi ? Parce qu’ils peuvent s’extraire des logiques purement techniques pour dialoguer, convaincre leurs interlocuteurs par des arguments robustes, relier des idées différentes et expliquer clairement des notions complexes.
Dans son essai La culture des individus, le sociologue Bernard Lahire montre d’ailleurs que l’aisance culturelle (et l’intelligence émotionnelle qu’elle stimule) est une ressource sociale concrète [7]. Entre autres bénéfices, elle permet à ceux qui s’appuient sur une culture générale solide d’être légitimes face à n’importe quel interlocuteur.
C’est le sens de ce propos célébrissime attribué à Charles de Gaulle :
« La véritable école du commandement, c’est la culture générale. »
Eh oui, l’assurance des personnes brillantes contribue directement à certaines formes de leadership naturel, fondé sur la clarté et la capacité à relier les idées.
4. Le carnet de culture : un outil pour cultiver son intelligence au quotidien
Alors comment développer sa culture générale dans un quotidien chaotique ? Le carnet de culture, outil efficace, aide à ancrer les idées dans la durée.
Son principe est simple : vous y inscrivez les informations intéressantes que vous souhaitez retenir au quotidien (une idée, une référence, une citation, un schéma, etc.) non pas en les recopiant, mais en les reformulant dans une présentation claire. Cet effort déclenche un traitement cognitif profond.
Commencez par quelques pages de table des matières. Ensuite, chaque sujet peut occuper une ou plusieurs doubles pages, selon sa richesse. Commencez toujours par un titre clair et quelques informations utiles : date, type de source, auteur, et autres champs structurants.
Rassemblez ensuite les éléments essentiels : points clés, notions, repères chronologiques, etc. L’objectif n’est pas d’accumuler, mais de synthétiser, en croisant les sources et en sélectionnant ce qui fait sens pour vous. C’est ce travail de tri qui ancre les idées.
Vous activez ainsi ce que Patricia DeWinstanley et Elizabeth Bjork, chercheuses en psychologie cognitive, appellent l’effet de génération [8] : reformuler une information avec ses propres mots améliore la rétention à long terme. Ce bénéfice s’accentue encore si l’on utilise aussi des couleurs, des schémas ou des dessins. Le psychologue Allan Paivio l’a expliqué avec sa théorie du double codage : notre mémoire est plus efficace quand elle combine deux canaux : le verbal et le visuel [9].
Le support papier joue un rôle majeur. Selon une étude de Mueller et Oppenheimer [10], l’écriture manuscrite oblige à filtrer l’essentiel. Ce tri mental améliore à la fois la compréhension et la consolidation.
Pour l’anecdote, le carnet de culture existait déjà dans l’Antiquité sous le nom locus communis, puis commonplace book en anglais. Aujourd’hui, il revient, notamment sur TikTok, avec la même fonction : rassembler les idées à retenir.
5. Explorer un thème par mois pour construire sa culture sans s’épuiser
En complément du carnet de culture, vous pouvez creuser un thème par mois pour vous approprier un sujet. Au fil des mois, vous vous constituerez une vision claire du monde. Vous verrez se dessiner une architecture d’ensemble : c’est précisément ce qu’on appelle une culture générale.
Commencez par un objet d’étude précis, en-dehors de votre zone de confort intellectuel (par exemple : la mythologie nordique, l’astrobiologie, les révolutions industrielles, ou encore l’inconscient lacanien).
Prenez deux ou trois sources fiables à lire ou écouter dans le mois. Cela peut être un livre, un podcast, une vidéo sur YouTube, un MOOC… Vous pouvez dédier un carnet à ce parcours.
Comme pour le carnet de culture, commencez par noter le sujet et les supports d’étude essentiels, comme des ouvrages, des documents écrits, des contenus audio ou visuels. Utilisez les pages suivantes du carnet pour résumer les idées et faire des liens. Soyez généreux en remarques personnelles et en hypothèses.
Échelonnez votre temps de lecture sur quatre semaines pour éviter la saturation. En effet, les travaux de Cepeda et son équipe [11], menés à l’Université de Californie, confirment qu’un espacement des sessionsd’étude permet bien mieux de consolider les apprentissages qu’une répétition concentrée sur une période courte.
Stimulez votre attention et soutenez votre mémoire travail grâce à la culture !
Vous l’avez compris : la culture générale ne se limite pas à accumuler des savoirs valorisants. C’est avant tout un avantage concret pour votre activité. Elle vous aide à rester concentré, à comprendre un raisonnement complexe, et à prendre plus facilement une décision lorsque les options s’accumulent.
Pour la faire grandir, vous pouvez noter régulièrement ce que vous lisez dans un carnet. Vous pouvez aussi creuser un thème par mois, à partir de sources fiables. Cette méthode accessible donne de la cohérence à vos idées et de la continuité à votre attention.
J’ai moi-même constaté ces effets après plusieurs années à survoler une quantité astronomique d’articles, vidéos et publications courtes, poussée par la nécessité d’aller vite pour produire davantage, sans approfondir ni relier les contenus entre eux. Contre toute intuition, en revenant à la lecture de textes exigeants, stylo en mains, j’ai commencé à travailler plus vite et à être satisfaite plus rapidement des résultats.
Concrètement, j’ai pu à nouveau structurer ma pensée, organiser mon travail et, surtout, retrouver une continuité mentale. Plus surprenant encore, ces habitudes culturelles ont calmé mon esprit et réduit mon stress face au chaos quotidien des sollicitations et des distractions.
Ce changement ne s’est pas fait du jour au lendemain, mais chaque étape a renforcé ma capacité à rester concentrée et à avancer sereinement dans mes projets, malgré les interruptions et la surcharge d’informations.
Sources :
- [1] Michel de Montaigne, Essais I, Chapitre 3, exemplaire de Bordeaux, 1595
- [2] Chris Bailey, Hyperfocus, DIATEINO, 2024
- [3] CK-THEORY.ORG
- [4] Lachaux, Jean-Philippe. Le Cerveau funambule,. Odile Jacob, 2015.
- [5] BOULLIER.BZH
- [6] Enquête « Culture générale et management » par l’Institut de l’Entreprise, cité par Le Monde des grandes écoles
- [7] Bernard Lahire, La Culture des individus, éditions La Découverte, 2006
- [8] Patricia Ann Dewinstanley et Elizabeth Ligon Björk : Processing strategies and the generation effect: Implications for making a better reader
- [9] Allan Paivio : Mind and Its Evolution: A Dual Coding Theoretical Approach, Psychology Press, 2006
- [10] Pour la science – n° 448 – Février 2015 : Faut-il prendre des notes à la main ou à l’ordinateur ?
- [11] Emilie Gerbier : Effet du type d’agencement temporel des répétitions d’une information sur la récupération explicite